vendredi 17 juillet 2020

Les Mangeurs de noisettes

LIVRE I - Fable 16 - (Editions Thot en 2018 - Fabuleux Dédale)


 
Les mangeurs de noisettes

Des mangeurs de noisettes
Il en est de trois sortes :
Par peur de la disette
Celui qui les conforte
Pour l’immédiat plaisir
Il y a le glouton
Pour les en dessaisir
Toujours un faux-jeton.
Eclairons donc ce fabliau
Par un troublant trio.
Pour six avelines au sol, un mulot furieux
Criait à l’écureuil qui voulait les garder :
« Je les ai vu avant et ce fut laborieux
Donc je n’entends pas me faire roublarder ! »
L’économe animal
Qui n’aimait pas le gaspillage
Se boucha les oreilles à son babillage
Ne voulant rien entendre du triste féal.
Arriva soudain à propos
Saisissant les noisettes
La sitelle orangée qui avait vu l’appeau
Comptant en faire sa dînette.
« Il est », dit-elle, « assez de ces  gamineries
Votre queue en panache
Ne vaut chicanerie
Quand à vous la ganache
Ne vaut mutinerie
Il faut que ça se sache
Je suis dans la finance des fruits frais
Et de ces avelines
Je vous offre intérêt. »
« Comment ça ? », dirent les deux cucul-la-praline.
« Pour tout placement dans nos coffres
Je vous donne du cinquante pour cent d’avance
N’est-ce pas là belle offre
Pour vos six noisettes la chance
D’en gagner la moitié ? »
« D’avance ? », ânonna l’un
Quand l’autre fit pitié
De son œil fiscalin.
« Si tel est notre accord », dirent les mammifères
« Quand donc livrerez-vous ? »
« Dans les six jours francs », dit la sitelle très fière
« Je donne rendez-vous
Et donc sur les six je ne vous en prends que trois
Puisque l’on paye d’avance sans piauler
Ce que l’on vous octroie. »
Pas besoin de savoir voler
Ni d’être très savant
Il s’agit de grand art que de vendre du vent.





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